UN COEUR A PRENDRE
Antoine, un habitant du lieu dit "les chirouses", situé entre le village d'anglards et celui de Compains, en avait assez de la solitude. Bien sur, l'été, avec les travaux des champs, de l'aube au crépuscule, le temps s'écoulait vite et la fatigue, l'emportait. Antoine n'avait même pas besoin de compter les moutons pour s'endormir dans la fièrté du travail accompli.
Mais l'hiver, c'était différent!
Il pouvait les compter dix fois sans parvenir à trouver le sommeil. Les véillées lui paraissaient interminables. De plus, la télévision était loin de le passionner en dehors des informations régionales et quelques documentaires.
Chaque nouvelle année venait lui en apporter la confirmation; ce qui manquer à son bonheur; c'était la présence d'une femme.
Pas une de ces femmes de la ville qui passent leur temps à se maquiller; à se pomponner, comme disait sa grand-mère; non, une femme active, courageuse qui tiendrait son intérieur, préparerait les repas; aiderait à penser le troupeau, apporterait un peu de chaleur dans sa vie et serrerait auprés de lui au creux du lit.
Antoine venait de fêter ses quarante ans et se disait grand temps de réaliser ce rève un peu fou qui le tourmenter de plus en plus; "prendre femme!".
Mais qui pourrait accepter de le suivre dans ses montagnes sauvages ou on ne rencontrait pas âmes qui vivent, en dehors de quelques touristes égarés, l'été.
Il se confia au mère de besse qui après mûres réfexions le mît en contact avec une candidate au mariage dont il connaissait le sérieux.
Elle avait cinq années de moins que lui, l'âge idéal, lui sembla-t'il, pour se fixer enfin.
Son visage était joli-pointjoli-point trop, quand même, car selon Antoine, une femme trop belle représenterait un danger et son tour de taille plutôt important correspondait aux canons de la beauté pour cet éleveur de vaches salers.
Bref, à la suite de plusieurs rencontres, tout sembler aller merveilleusement bien et le projet en bonne voie de réalisation.
Ensuite, Germaine vint à la ferme, en explorant tous les recoins: s'extasia sur la beauté du paysage, la pureté de l'air et la grandeur de la bâtisse.
Mais Antoine comprit aussitôt qu'un grain de sable allait faire grincer les rouages de leur belle entente; Germaine ne vint pas seule. Elle était accompagnée de sa mère et de sa grand-mère et déclarant en la désignant:
-Si vous voulez de moi pour compagne, il faudra les prendre aussi! Pas question que je les abandonne!
En un homme de la terre avisé, antoine souleva sa casquette pour se gratter le crâne avec insistance. Ce geste prouva que son cerveau était soumis à un bouillonnement intense dont il n'était plus le maître.
La future épouse comprit son embarras et ajouta pour le convaincre:
-Vous m'avez dit, la solitude vous pèse. Eh bien, d'un seul coup, vous aurez toute une famille sous votre toit, ce sera formidable,non!
-Pour être franc...commença t'il
elle le coupa:
-Réfléchissez. En plus, vous aurez tous les avantages: grand mère vous tricotera pull-over et chaussettes; maman vous fera la cuisine; elle est très experte dans les plats auvergnats et moi, je vous apporterai l'attention et la tendresse dont vous avez besoin. Idéal, non! Qu'en pensez-vous?
Antoine hésita longuement, géné, puis finit par déclarer d'une voie remplit de regrets:
-Je suis désolé, mais le problème, c'est que je désire épouser une seule femme. Trois à la fois, cela fait beaucoup pour un débutant.
Le regard si doux de la candidate au mariage s'obscurcit immédiatement, il devient rès dur et méprisant. Germaine poussât dehors mère et grand-mère, aussi décues qu'elle, et déclara d'un ton aigrelet:
-Surtout, ne cherchez pas à me revoir. Je sens bien que vous n'avez pas l'esprit de famille.
-Voyons, ne vous fâchez pas...
Il ne pût continuer:
-Et en plus, vous êtes un mufle, monsieur, oui, pour ce que vous avez déclaré, vous êtes un mufle.
Abasourdi, Antoine les regarda s'éloigner sans dire mot.
Aujourd'hui, il est encore célibataire et ne sait toujours pas ce que c'est un mufle...
Jean-Claude,